8 questions sur l’entrepreneuriat féminin avec Me Anne-Edma Louis

Dans cette entrevue, on discute avec Me Anne-Edma Louis, une jeune entrepreneure, avocate spécialisée en droit des affaires, en fiscalité et en droit immobilier et fondatrice d'un cabinet d'avocats offrant des services juridiques adaptés aux entrepreneur.e.s en démarrage et en croissance. Anne-Edma nous a parlé des défis qu'elle a rencontrés en tant que femme dans le monde des affaires, de la liberté créative qu'elle a trouvée en tant qu'entrepreneure et nous donne des conseils pour surmonter le défi de la fixation de ses tarifs, ainsi que les stratégies qu'elle a utilisées pour se faire connaître et créer des relations durables avec ses client.e.s.

Si vous avez besoin d’un peu d’inspiration pour votre propre parcours en entrepreneuriat féminin, vous êtes au bon endroit! Poursuivez votre lecture pour en apprendre plus sur son expérience dans le domaine!

Me Anne-Edma Louis
Qu'est-ce qui t’a inspirée à devenir une entrepreneure? 

« Je n’avais pas l'impression d'avoir trouvé un cabinet d'avocat qui reflétait les valeurs que je voulais véhiculer, qui était aussi inclusif que je le voulais et qui offrait un environnement de travail que je trouvais agréable. C’est vraiment important pour moi d’avoir une entreprise qui est alignée avec mes valeurs. Une des valeurs qui est importante pour moi est la liberté, autant la liberté de mouvement, mais aussi la liberté de mon temps. C’est certain qu’en tant qu’entrepreneure, ce n’est pas vrai qu’on a tant de temps libre, mais je trouve qu’on a quand même plus de liberté en général, mais aussi au niveau de la créativité. Je peux vraiment créer quelque chose à mon image quand j’ai une idée et quand j’ai quelque chose à proposer, je peux le faire. Je ne pense pas que j’aurais pu avoir cette liberté et cette flexibilité de créativité, de mobilité et de mon temps en travaillant pour quelqu’un d’autre. 

Les services que mon cabinet offre sont pour les entrepreneur.e.s qui sont en démarrage ou en croissance, un peu comme Raphaëlle (la fondatrice et présidente de WOMA Marketing) quand je l’ai connue il y a 6 ou 7 ans versus qui elle est devenue aujourd’hui. À l’époque, ça n’aurait pas forcément été un fit naturel pour elle de faire affaire avec un cabinet traditionnel comme on les connaît, c’est-à-dire le standard quand on imagine un cabinet d’avocats. Je voulais offrir un service qui était aussi adapté à quelqu'un comme elle, la Raphaëlle d’il y a 6 ou 7 ans qui démarre son entreprise, qui veut avoir accès à l'information et qui veut se sentir épaulée, sans que ce soit une dynamique qui ait l’air intimidante. À la base quand on pense à “avocat”, on peut avoir l'impression que c'est très rigide. Moi, je voulais que ce soit terre à terre. C'est une autre raison qui m'a poussée à le faire moi-même.  »

Quels ont été les défis que tu as rencontrés en tant que femme dans le monde des affaires?

« Pour n'importe qui qui déciderait demain matin de devenir entrepreneur, surtout si c’est pour offrir un service professionnel, un des défis est de se faire connaître et de gagner la confiance des gens. Ce n’est pas nécessairement un défi qui concerne juste les femmes, toute personne dans cette situation doit se faire connaître et bâtir sa réputation. Par contre, un défi qui serait plus spécifique à la gente féminine, autant pour les femmes entrepreneures que les femmes de carrière, c’est que par exemple, les femmes ne vont pas toujours négocier leurs salaires, ce qui fait qu’elles vont être payées moins que leurs pairs. Je ne suis pas dans cette catégorie, parce que je n’ai pas un emploi standard, mais en tant qu'entrepreneure, ça peut se refléter dans notre capacité à fixer nos prix à la valeur qu’ils devraient être. Ça m’a pris du temps pour fixer un tarif qui reflète vraiment la valeur du service et des fois, c’est encore un challenge aujourd’hui. Je pense que c'est parce que nous, les femmes, on peut avoir plus de difficultés à dire « C'est ça que ça coûte, c'est ça que ça vaut, puis voilà! »

Comment as-tu surmonté ce défi et quel conseil donnerais-tu à d'autres femmes qui y font face aussi?

« C'est un défi constant. Ce qui aide, c’est au moins de savoir combien les gens facturent dans son industrie. On peut demander autour de soi à des pairs, autant femmes que hommes, pour avoir une idée du taux horaire au stade de sa carrière pour ensuite mettre son pied à terre. Il faut aussi se faire confiance et accepter qu’il y a certains client.e.s qui ne vont pas nous suivre. Ce n’est pas parce qu'un.e client.e dit « Non, c'est trop dispendieux » que le prix n’est pas le bon. Ce sera toujours un défi. Au fur et à mesure que le temps passe, le tarif va augmenter et ce n’est pas tout le monde qui va l’accepter. Le but, c'est d'être très confiante dans son approche. »

WOMA Marketing a assisté au 5 à 7 de ton cabinet dernièrement et on a vu la relation et que tu as avec tes client.e.s et même la synergie entre eux.elles. 
Par rapport au défi de se faire connaître que tu as mentionné, quelles actions as-tu posées pour créer ces relations et comment les entretiens-tu?

« J'ai misé sur la visibilité en ligne. La majorité des gens qui étaient présents à l’événement, c’est possible que je ne les avais jamais rencontrés en personne! Il y a eu la pandémie, puis une bonne partie d'entre eux sont devenus clients entre 2020 et 2022. Le fait d'avoir été très présente sur les réseaux sociaux, plus particulièrement LinkedIn dans mon cas parce que c’est là que se trouve la clientèle professionnelle, a permis de créer cette connexion qui n’est pas “réelle”, mais qui est peut-être réelle pour eux. Partager du contenu régulièrement chaque semaine fait en sorte que les gens développent eux-mêmes cette relation avec moi. Au moment où ils nous contactent, ils m'ont déjà vue et ont l'impression de déjà me connaître. J’ai forgé cette communauté en ligne qui, entre eux ou à travers moi, ont des atomes crochus d'une certaine manière. Il y a beaucoup des gens qui sont issus de différentes communautés ethniques ou des personnes qui sont des minorités visibles. La plupart d'entre eux ne sont pas nés à Montréal, contrairement à moi qui ai grandi toute ma vie ici. Ça crée aussi cet ancrage entre eux parce qu'ils ont un bagage similaire auquel ils peuvent se référer. Finalement, en étant aussi femme noire, j'ai attiré des gens qui ont trouvé un modèle ou un.e professionnel.lle qui leur ressemble, puis ils connectent à travers ça.

C’est pour ça que, par rapport au défi de bâtir sa réputation et se faire connaître, il faut miser sur les réseaux sociaux. C'est gratuit! Si j'avais voulu me lancer en affaires il y a disons 20 ans, j’aurais été obligée de le faire à l'ancienne où j’aurais dû forcément aller à des événements de réseautage, connecter avec les gens individuellement et espérer qu'ils me réfèrent. Aujourd'hui, avec Internet, je fais du réseautage 24/7 finalement, et ce, en ligne et sans avoir besoin de sortir de chez moi! C’est tant mieux parce que je suis naturellement introvertie, ce qui fait que je n’aime pas particulièrement les événements. Par contre, j'aime organiser les miens par contre parce que là, c'est mon crowd et on est sur la même longueur d'onde. Bref, je suggère à quiconque qui veut se lancer en affaires aujourd'hui d’opter pour le web à 100%. »

Quelles perspectives et compétences uniques apporte-tu à ton entreprise en tant que femme?

« Mon sens de l’empathie. En tant que femme, on peut faire preuve de davantage d'empathie. Je pense que mes employé.e.s apprécient ce côté humain que j'apporte. Ça doit être l'énergie féminine qui fait en sorte qu’on est beaucoup plus sensible aux employé.e.s. Je prends conscience que ce sont des humains qui ont aussi des vies privées qui peuvent être chamboulées par X raisons. Je leur crée un espace de travail qui est un safe space. S'il y a quoi que ce soit, s’ils ne sont pas confortable ou s’ils ont un enjeu familial, ils ne sentent pas la pression de performer quand même. On n'est pas là pour ça, on est avant tout des humains qui collaborent à l'avancement de l'entreprise au bénéfice d'entrepreneur.e.s. »

Comment gères-tu les exigences de la gestion d'une entreprise avec ta vie personnelle et tes responsabilités?

« Ce n’est pas toujours facile! Dernièrement, ce qui m'a aidée, c'est de prendre conscience qu'il y aura toujours du travail à faire. Je suis très achiever dans mon trait de caractère type A, ce qui fait que j’aimerais absolument tout finir. Maintenant, je regarde ce qui est vraiment urgent et ce qui doit vraiment être fait. Dans les faits, c’est de faire des vraies priorités et de voir ce qui peut être reporter au lendemain, voire au surlendemain, et d’être en paix avec le fait que ce ne sera jamais vraiment fini et qu’il y aura toujours des choses à faire. Par exemple, quand j’ai quelques petits trucs à faire, autant du côté personnel que professionnel, je vérifie ce qui doit absolument être fait aujourd’hui, en raison d’une deadline par exemple, et le reste sera repoussé au lendemain.

Une autre stratégie que j’emploie pour m’aider est de m’entourer et de déléguer. C’est super important d'apprendre à déléguer, sinon on ne va jamais s'en sortir! Lorsqu’on démarre au début, c'est sûr qu’il est possible qu'on soit seule, mais par la suite, il faut essayer de s'entourer le plus possible. Je ne travaille pas toute seule, donc quand je prends des vacances, ce sont de vraies vacances. Ce n’était pas le cas jusqu’en 2021. Avant, je n’avais pas recruté d'autres avocats et j'ai réalisé que je ne pouvais pas avoir une vie si je n’avais pas d'autres personnes qui ont les mêmes compétences que moi pour m’accompagner. Finalement, quand j'ai recruté des avocats, eh bien, ça a changé ma vie! Je n'étais plus la seule personne qui pouvait répondre aux questions des clients. Depuis, mes vacances sont de vraies vacances.

Après, on a tous notre définition de ce que c'est de réellement décrocher. Il y en a pour qui ça veut dire de ne vraiment pas regarder ses courriels pendant deux semaines. Moi, ça me stresserait trop! Par exemple, lorsque je suis en vacances, je vais aller regarder mes courriels le mercredi ou le mardi soir, non pas pour répondre, mais juste pour m'assurer que tout roule. Puis, le jeudi soir, je vais faire la même chose et la semaine suivante, je fais encore deux check ins. Comme ça, s’il y a quelque chose qui semble important, je peux demander à quelqu'un de mon équipe de s'en occuper. C'est une façon pour d'avoir la paix d’esprit complètement et de vraiment décrocher, tout en évitant qu’il y ait une catastrophe et que personne ne puisse m'en parler. Pour moi, c’est totalement correct et je considère quand même que ce sont de vraies vacances dans la mesure où je n’ai pas à ouvrir mon ordinateur ou à rédiger quoi que ce soit. »

Comment vois-tu le rôle des femmes dans les affaires évoluer au fil des ans?

« Franchement j'ai l'impression qu'on va voir de plus en plus de women owned businesses. Initialement, on voyait le monde des affaires comme étant très dominé par les hommes, mais je pense vraiment, du moins de ce que je constate ces dernières années, que ce sera de plus en plus normal ou commun de voir plus d’entreprises détenues par des femmes. Peut-être qu'on va même atteindre une certaine parité éventuellement! En plus, avec Internet, tu peux gérer ton entreprise de la maison ce qui n’était pas forcément possible avant la pandémie. De facto, ça nous aide encore plus à avoir un équilibre entre notre vie privée et notre vie d'affaires, ce qui rendra l’entrepreneuriat encore plus accessible à plus de gens, et surtout, plus de femmes. »

Quels sont les plans futurs de ton entreprise?

« Parallèlement au cabinet, on a aussi développé depuis début 2022 un volet éducatif en ajout aux services qu’on offre. On a créé un programme de formation qui s'appelle Code Entrepreneur. Mon but est que je ne voulais pas uniquement être prestataire de service, je voulais aussi permettre aux entrepreneur.e.s de comprendre davantage comment gérer leur entreprise en partageant plus d'informations sur l’aspect légal, fiscal et la comptabilité avec des notions qui sont utiles pour éviter certaines erreurs. Mes plans futurs seraient de continuer à nous positionner comme un cabinet qui dessert les entrepreneur.e.s, mais aussi d’ajouter à ce qu’on faisait déjà en éduquant encore plus les entrepreneur.e.s en démocratisant l’accès à l’information juridique, fiscale et comptable pour leur permettre de prendre des bonnes décisions d’affaires. »

Le futur de l’entrepreneuriat féminin! 

Anne-Edma a soulevé les défis uniques auxquels les femmes entrepreneures font face. Cependant, elle démontre que l'avenir des femmes dans l'entrepreneuriat est brillant. Tout comme Anne-Edma, on croit qu’il y aura de plus en plus d'entreprises prospères détenues par des femmes dans les années à venir. Alors qu’elles continuent à briser les barrières et à remettre en question le statu quo, il est essentiel de soutenir et de valoriser les femmes entrepreneures pour créer un paysage commercial plus diversifié et inclusif. C’est précisément pour cela que nous l’avons invitée à cet entretien! 

On tient à remercier Anne-Edma d’avoir pris le temps de répondre à nos questions et partager son expérience avec nous! Pour en savoir plus sur cette entrepreneure ambitieuse, allez jeter un œil sur ses présences en ligne!

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